19/10/2013
Nous nous voyons dans
l'obligation de donner une réponse collective et publique à ceux
qui, en Colombie et dans d'autres lieu de l'Abya Yala (Amérique
Latine) et d'Europe, se demandent et nous demandent (et nous
réclament) nos bulletins d'information habituels, particulièrement
visibles et, comme ils nous le répètent, utiles durant les
mouvements et les luttes de nos peuples. Il n'y a rien de plus
important pour nous que de pouvoir communiquer par le biais des
bulletins électroniques, avec les dizaines de milliers d'adresses
mails que nous avons collectées une par une, grâce à l'intérêt
que nous témoignent les lecteurs institutionnels, organisationnels
et personnels en Colombie, sur le continent et dans le monde.
Nous devons autant à
notre peuple et à ses luttes qu'au réseau de ceux et celles avec
qui nous nous communiquons depuis des années. C'est notre raison
d'être. Nous n'avons pas de ressources économiques mais nous avons
pu maintenir ces listes et notre communication active grâce au
soutien de rise-up, qui les administre justement parce que son mandat
et son engagement a été d'être présent et de soutenir la
communication populaire pour la résistance et les droits des
peuples. C'est avec angoisse et en espérant pouvoir débloquer la
situation le plus rapidement possible que nous vous annonçons,
lecteurs et lectrices, que les listes de distribution rise-up du
Tissu de Communication ont été bloquées depuis le 4 octobre
dernier.
Ces derniers mois, nous
avons eu des difficultés avec l'envoi de nos bulletins, le dernier
que nous avons réussi à envoyer, ayant pour titre « La
parole des peuples n'a pas de prix », a été reçu deux
jours après avoir été envoyé. Plus tard, sans pourtant être une entreprise, afin de nous mettre en conformité avec la Loi Hábeas
Data, nous avons envoyé deux messages pour demander à nos
contacts s'ils désiraient toujours recevoir nos bulletins ou non,
mais ceux-ci ne sont jamais arrivés. Dans la foulée nous avons
envoyé le bulletin informatif « Nous
nous soulevons en Minga pour ne pas continuer d'être ce que nous
n'avons jamais été » (en
français ici), qui n'est pas arrivé non plus.
Malheureusement, ce
blocage de nos listes Rise-up a non seulement empêché le Tissu de
Communication de faire circuler les bulletins d'information par
lesquels nous dénonçons les agressions du gouvernement, allié des
multinationales ; nous diffusons les revendications des
organisations indigènes ; nous rendons visible la parole des
communautés ; mais a aussi empêché la réalisation des
analyses, les réflexions critiques et propositions que nous
construisons par l'éthique communautaire qui nous caractérise en
tant que Tisseuses et Tisseurs pour la Vie et la Vérité. Le
moyen de communication le plus fort et le plus efficace que compte le
mouvement indigène, en pleine attaque nationale et mortelle de
l'Etat colombien contre la Minga, dont le travail a été de rompre
la muraille informative des médias commerciaux au service de la
répression et de la spoliation, est aujourd'hui complètement hors
d'usage puisque nous nous pouvons plus accéder à nos listes mail,
pour des raisons que nous ignorons et que nous ne pouvons résoudre
sans le soutien solidaire et respectueux à nos luttes et nos
mandats.
Nous
sommes interpellé-e-s par le fait que, alors même qu'il a été
appelé à renforcer la Minga Sociale et Communautaire contre le
projet de mort, avec une mobilisation nationale large, qui se
construit depuis des années, nos listes mail qui contiennent plus de
80 000 adresses de toute l'Amérique Latine se retrouvent bloquées.
Des contacts de personnes, collectifs, organisations et de beaucoup
d'autres « noeuds » de communication qui sont prêts à
nous aider pour traduire, publier, circuler, débattre et promouvoir
la parole libre qui naît de nos territoires, dans le but d'empêcher
qu'ils nous massacrent et nous méprisent.
Face
au blocage de l'information, le Tissu de Communication lance un appel
aux mouvements, collectifs et médias de communication indigènes,
populaires, alternatifs, entre autres, pour qu'ils prennent
connaissance de notre situation, se solidarisent et nous aident à
mener notre enquête pour savoir pourquoi, justement durant les
périodes critiques, notre parole est réduite au silence. Nous avons
tenté de différentes manières, sans succès, de rentrer en
contact avec rise-up. Sans exagération aucune, nous leur avons
expliqué que, en grande partie, la vie de nombreux et nombreuses
compañer@s mobilisé-e-s, la Minga et la résistance elle-même
dépendent du déblocage immédiat de ces listes mails.
Nous
remercions d'avance ceux et celles qui sont s'engagent pour une autre
communication, qui ne se fient pas à ce qu'ils/elles voient dans les
médias de masse et qui remettent en question la propagande qui leur
est faite. Nous vous remercions d'être attentifs aux informations
publiées sur notre site web www.nasaacin.org,
d'écouter notre bulletin informatif Kueta Susuksa (radio par
internet) et pour la visite des autres sites des organisations
indigènes du pays, qui diffusent l'information dans le cadre de cette
Minga. Nous tenons à féliciter les médias alliés pour leur
travail de communication tout en leur rappelant le besoin de
travailler en collectif pour la défense de la communication libre,
car si un seul de ces médias est réduit au silence ou exclu, c'est nous toutes et tous qu'ils réduisent au silence. Faire taire le Tissu de
communication et, en particulier les bulletins du Tissu, c'est
réduire au silence le média qui a le plus de portée et de
couverture pour faire connaître la Minga, la résistance,
l'agression du régime et le sens du partage de notre lutte.
Nous
ne nous sommes pas tus. Pendant que nous insistons pour rentrer en
contact avec rise-up et nous élargissons notre travail dédié à la
radio (Radio Pa'Yumat), nous vous invitons à nous chercher aussi sur
Facebook
pour que vous puissiez lire, écouter et voir la diversité des
paroles et des actions qui se tissent dans le cadre des mobilisations
en marche dans les différents endroits de Abya Yala. Peut-être que
parmi ceux et celles qui nous connaissent et nous lisent il y a des
personnes qui sont en contact avec les compañer@s de rise-up et
peuvent nous permettre de réutiliser les listes le plus vite
possible. Peut-être qu'en rendant publiques les voix de ceux et
celles qui nous écrivent pour nous demander nos bulletins
électroniques, nous pouvons résoudre collectivement ce blocage de
notre parole. Rien ne peut plus servir le régime, la spoliation et la
mort de nos peuples que le blocage de nous boîtes mail et de nos
bulletins informatifs.
Nous
vous remercions pour l'intérêt manifesté et nous continuons de
porter notre parole pour la mettre en marche en Minga, malgré ceux
qui veulent nous réduire au silence quelques soient leurs motifs.
En
toute sincérité,
Tissu
de Communication ACIN