Peuple Nasa

Paroles du peuple Nasa :

Notre Histoire :

Depuis l'arrivée des espagnols en 1553, à l'origine des violations continuelles des droits de nos communautés indigènes et paysannes, nous avons initié un processus d'organisation afin de faire respecter nos droits en tant que peuple. L'organisation régionale du Cauca, appelé Conseil Régional Indigène du Cauca (CRIC) naît en 1971 à Toribio, avec l'objectif de faire reconnaître ces droits. Cette organisation se construit à travers une plate-forme de lutte dont les principes sont les suivants :

« 1. Récupérer les terres des Resguardos (territoires indigènes)
  1. Agrandir les Resguardos
  2. Renforcer les cabildos indigènes (entités administratives et politiques propres)
  3. Ne pas payer de location de terrain
  4. Faire connaître les lois sur les indigènes et exiger leur juste application
  5. Défendre l'histoire, la langue et les coutumes indigènes
  6. Former des professeurs indigènes afin d'enseigner l'histoire relative aux indigènes et dans leur langue respective."

Au fil du temps, les communautés se sont mieux organisées. Se sont créés 7 grands projets communautaires dans le Nord du Cauca, impulsés par notre Père Páez Álvaro Ulcué Chocué, au service de notre cause, et décédé au court de notre lutte :
1. Proyecto Nasa, composé des Cabildos de Toribío, San Francisco et Tacueyó
2. Proyecto Global, composé du Cabildo de Jambalo
3. Proyecto Unidad Páez, composé du Cabildo de Miranda
4. Proyecto Integral, composé du Cabildo de Huellas Caloto
5. Proyecto Cxhacxha Wala, composé du Cabildo de Corinto
6. Proyecto Yu`Lucx, composé des Cabildos de Canoas, Munchique los Tigres et Cabildo urbain Nasa Kiwe Tekh Ksxaw dans la commune de Santander de Quilichao.
7. Proyecto Sa´t Fxinxi Kiwe, composé des Cabildos de Delicias, Guadualito, Concepción, Cerro Tijeras et Pueblo Nuevo Ceral.
Ces projets sont appliqués par le biais d'assemblées qui se réalisent tous les deux ou trois mois, lorsque  les communautés se réunissent pour évaluer le processus communautaire de chaque projet et planifier l'avenir. Ces assemblées sont menées à bien grâce à une méthodologie participative, à partir de la base, organisée en commissions. Jusqu'alors, seuls les membres des projets communautaires apparaissaient comme les représentants des communautés. Mais par la suite, face à la propagation des cultures illicites sur le territoire, une Convention fut signée avec le Gouvernement national afin d'éradiquer ces cultures en échange de ressources pour améliorer le niveau de vie des communautés.
 Plus tard, une commission de 7 personnes fut nommée, appelée Equipe Mixte de la Zone (une personne pour chaque commune), qui se chargerait d'élaborer le diagnostique de chaque commune et de faire un classement des nécessités que le Gouvernement aiderait à résoudre. Mais ce fut un échec car, comme préalablement diagnostiqué, le Nord présenta des propositions de projets pour 4 mille millions de pesos (1 565 000 euros) qui finalement furent réduis à 100 millions de pesos (39 150 euros), avec lesquels purent être soutenus seulement 2 projets zonaux.



Quand est entré en vigueur le décret 1088 de 1990, permettant la création d'associations, nous avons réfléchi avec l'Equipe Mixte et les gouverneurs indigènes et, finalement, nous avons approuvé la création de l'Association de Cabildos dans le but d'assurer une meilleur intégration. Car l'unité multiplie les possibilités. L'Association de Cabildos du Nord du Cauca (ACIN) est créée en 1994, reconnue par le Ministère de l'Intérieur via la résolution 052 du 2 octobre de 1994.
L’Association commence à fonctionner pratiquement dans la rue et les réunions se réalisent dans un parc, dans la maison d'un compagnon de l'Equipe Mixte ou dans la maison d'un des assesseurs. Peu à peu, un budget est consolidé et l'on trouve un petit bureau à louer, où travaillent l'assesseur et la secrétaire. L’Association se structure de plus en plus et, aujourd'hui, développe plusieurs programmes et compte deux maisons à son actif, où sont organisées de nombreuses activités.

L'Association de Cabildos Indigènes du Nord du Cauca


Les projets communautaires envoient leur représentant élu en assemblée depuis leurs localités pour former le Conseil de la ACIN, qui sont les 7 leaders qui s'engagent à orienter politiquement et accompagner tous les processus d'organisation, se coordonnent avec les gouverneurs des cabildos, les coordinateurs des projets communautaires, des tissus de vie et ceux des programmes et des projets de la zone Nord. Par ailleurs, l'ACIN s'articule avec d'autres organisations de cabildos afin de participer au Conseil Indigène du Cauca (CRIC), qui fait aussi partie de l'Organisation Nationale Indigène de Colombie (ONIC).



L'ACIN représente le mouvement indigène le plus reconnu du pays dans la défense de son plan de vie, entendu, non pas comme un document, mais comme un rêve collectif et un chemin quotidien pour rendre ce rêve réel, ayant comme référence ses principes de vie : Spiritualité, Réciprocité, Intégralité et Usage respectueux de la terre, en plus des Principes d'organisation qui ont accompagné les communautés dans toutes leurs luttes : Unité-Territoire-Culture-Autonomie.
Dans le même temps, le Plan de Vie cherche à consolider la construction de notre processus ancestral en pleine liberté et autonomie à travers la participation effective de la communauté.
Participation qui se traduit par les Mingas (formes de travail collectif), Congrès, Conseils, Assemblées communautaires, comités ou groupes, programmes, Tejidos (Tissus), d'autorités (Cabildos, médecins traditionnels (Thë´walas)), Resguardos, communes, entres autres. C'est dans ces espaces que sont prises les décisions, sont désignés les responsables et les travaux, sont présentés les rapports, est réalisé le suivi des programmes et projets des Tejidos, l'évaluation et l'exercice du contrôle démocratique. C'est ainsi qu'entre tous nous construisons une alternative. Que nous gouvernons en obéissant.
Cette dynamique du Plan de Vie a été possible grâce à une structure actuellement en vigueur, formée par les composants Politique-Organisation que sont : les congrès, mobilisations, projets communautaires, assemblées, réunions directives ; mais également par le composant Technique-Opérationnel, représenté dans les Tissus de Vie qui sont organisés ainsi :
  • Tissu Économique Environnemental qui développe des formes productives, de conservation, d'échange, et d'économie du Peuple Nasa en équilibre et harmonie avec la terre mère.
  • Tissu Peuple et Culture qui promeut l'identité et le bien-être en harmonie avec la terre mère et inclus les Programmes de Santé, Education, Femme, Famille et Jeunes.
  • Tissu de Justice et Harmonie qui propose des initiatives de formation, de coordination et d'exercice du droit en fonction de la Loi d'origine et du droit propre en coexistence avec le cadre constitutionnel et juridique du pays. Il comprend les instances suivantes : Équipe juridique zonale, Nasa Üus yutxpenxi, Tribunal International d'Opinion, École de formation de Droit Propre et Commission Politique et Organisation).
  • Tissu de Défense de la Vie qui met en application des stratégies et mécanismes pour la défense de la vie et des Droits de l'Homme, ce qui inclu la Garde Indigène.
  • Tissu de communication et relations externes pour la vérité et la vie qui incorpore et articule les stratégies de communication traditionnelles et médiatique pour informer, réfléchir, décider et agir, en plus de promouvoir l'initiative diplomatique de la ACIN, dans le but de défendre la vie des personnes, la survie du territoire et du processus.
De la même manière, le processus du Nord du Cauca jouit d'une grande reconnaissance pour sa résistance pacifique au conflit armée et aux stratégies externes d'extermination et de dépossession des terres dont sont victimes depuis plusieurs siècles les peuples indigènes. Parce que le conflit social et armé que vit le pays et les idéologies qui le nourrissent, le néolibéralisme et la révolution armée, affectent et tentent de détruire le Plan de Vie, en nous éloignant chaque fois plus de notre rêve, fragmentant les composants politiques et organisatifs, créant une situation d'urgence permanente et altérant les dynamiques d'organisation et de vie des communautés sur le territoire.
Des acteurs comme la guérilla et l'Etat sont ceux qui, par leurs actions et leurs politiques affectent le mouvement indigène du Nord du Cauca. D'une part il y a l'intérêt de la guérilla à contrôler militairement et politiquement le territoire pour avancer dans ses objectifs de lutte armée, vue comme unique alternative face à la situation du pays. Dans cette perspective, le processus indigène et populaire est considéré comme un obstacle pour son avancée.
D'autre part, l’État, dans son ambition de contrôle militaire du territoire afin de l'annexer au plan global d'intérêts corporatifs, profite des attaques des guérilleros pour entreprendre une offensive militaire vendue de manière publicitaire comme étant contre les FARC, mais dont l'intérêt est de neutraliser le processus communautaire indigène.
Ainsi pour affronter cette situation et renforcer le Plan de vie mit en péril, l'ensemble de la structure de l'organisation a comme objectifs :
Renforcer l'Autonomie : renforcement qui se fait par la Planification communautaire, les Plans de santé, l’Éducation, l'exercice du Droit Propre et les espaces de prise de décisions, en créant des alliances stratégiques avec d'autres secteurs sociaux.
Rendre visible le Plan de Vie, le territoire et ses habitants par le programme Minga en Résistance et la Minga des peuples.
Ce sont les objectifs qui guident tout le travail à l'intérieur et à l'extérieur du territoire, parce qu'à l'origine, le Plan de Vie du peuple Nasa est un processus de communication qui se construit par lui-même par l'échange permanent des sens, des sentiments, des idées et des mots qui récoltent l'expérience et la conscience de la réalité. A l'origine de la communication se trouvent les racines et les pratiques spirituelles ancestrales. La communication, par essence, se pratique avec l'aide des médecins traditionnels qui permettent de maintenir la relation constante avec la vie sous toutes ses formes. Ceci est l'origine et le fil conducteur du processus.



La force du processus, nourrie par la cosmovision et les pratiques permanentes actualisées, réside dans les visites, les assemblées, les congressistes, les Mingas, les Réunions directives et les diverses réunions. Les décisions collectives et la participation permanente des communautés dans toutes les réflexions et actions, de la même manière que l'action collective à travers les Mingas, est la vie du processus. Sans consultation et communication constantes entre tous les niveaux d'organisation et de décision se déchirerait le tissu vivant de savoirs qui constituent le Plan de Vie en construction.



La communication réciproque avec l'extérieur s'est convertie en un fil qui maintient en vie le processus. Ces dernières années la parole et les actions produites par le processus communautaire sont sorties du territoire pour se faire connaître dans le pays et le monde. Cette voix, cette ligne de vie, a provoqué la mobilisation de voix solidaires et de soutiens appropriés et opportuns dans ses moments d'urgence. Grâce à ces soutiens, les dénonciations d'abus et d'agressions ont reçu un écho. L'accompagnement et la solidarité ont permit de sauver des vies, de protéger, de récupérer, de maintenir la force et l'espérance et savoir que nous ne sommes pas seuls. Les plans de vie se connaissent et sont respectés grâce à la parole en marche depuis ses origines dans le territoire ancestral jusqu'à l'extérieur et se partage amplement. Malgré cela, il nous manque encore beaucoup à apprendre, identifier, mesurer et appliquer pour donner de la puissance à la communication interne et externe de l'ACIN.



Situation

Notre territoire est situé dans une région très importante pour le développement du pays et extrêmement stratégique pour les groupes armés en conflit et pour le narcotrafic, étant un endroit de communication aisée entre l'intérieur du pays, la région des plaines et le port national sur la côte pacifique. C'est aussi un lieu où naissent de grandes sources hydriques et des grandes mines de chaux primordiales pour au développement des grandes entreprises et de l'agroindustrie régionale. Nos eaux arrosent les 30% de la production de sucre qui s'exporte dans le pays.
Toutefois c'est un territoire traditionnellement abandonné par l’État : l'indice NBI (nécessités basiques non satisfaites) de la population est de 85% et l'espérance de vie est de seulement 40 ans, quand la moyenne en Colombie est de 69 ans.
Notre processus d'organisation a été le résultat de nombreuses années de lutte et de travail, pour la reconnaissance étatique de nos autorités et de nos formes d'organisation et de vie. Pour la récupération de nos terres et la reconnaissance de nos territoire par l'Etat. Pour la reconnaissance nationale et régionale de notre identité et de nos droits, de notre capacité et autonomie dans le contrôle ainsi que l'administration de notre territoire et nos ressources financières. Cette lutte nous a causé beaucoup de morts, nombre de nos leaders, jeunes, enfants, femmes et hommes ont été assassinés et massacrés par tout type de forces : propriétaires terriens et chefs politiques, l'armée et la police en leur nom, la guérilla, le narcotrafic et maintenant les paramilitaires. Cette lutte nous l'avons livré avec notre peuple Nasa dans la région et d'autres peuples indigènes et organisations communautaires, à travers notre organisation régionale (CRIC) et nationale (ONIC).

Autorités traditionnelles

L'Assemblée, c'est la rencontre de tous, où se prennent, au consensus, les grandes décisions en rapport avec la vie, le contrôle du territoire, la législation et la justice. L’Assemblée est la force de l'organisation. La présence et la participation à celle-ci, mesure notre force ou notre faiblesse. Dans l'année se réalisent près de 100 assemblées avec la présence en moyenne de 600 personnes par assemblée, bien que certaines réunissent jusqu'à 3000 personnes (zonales) et 15000 personnes (régionales).
Le cabildo : ce sont les personnes nommées par les communautés pour représenter l'autorité dans le territoire, selon la distribution suivante : Gouverneur principal, gouverneur suppléant, Maire ou capitaine, Secrétaire, trésorier et officier de police.
La minga communautaire : c'est la forme de travail communautaire traditionnel. Par ce biais se réunissent de manière obligatoire toutes les familles d'une vereda (hameau), un jour par semaine pour réaliser différents travaux de bénéfice commun. Il y a 304 communautés veredales dans la zone, regroupant 25189 familles. A la fin de chaque Minga, il y a toujours un espace pour résoudre les problèmes locaux de la communauté et pour la programmation d'activités.
Les Plans de Vie, au nombre de sept dans la zone, représentent le processus communautaire de développement des plans, programmes et projets dans les Resguardos.
Existe également l'équipe de Conseillers, élus pour chaque projet communautaire, qui réalisent le travail de représentation et gestion des cabildos et des communautés.

http://nasaacin.org/sobre-acin




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