dimanche 14 octobre 2012

Lire et comprendre la Terre Mère est notre principe de communication


10 octobre 2012

« Lire les signes du corps, comprendre le chant des oiseaux et le bruit de la rivière, fait partie de notre communication ancestrale, spirituelle, indigène », il s'agit d'une des nombreuses réflexions menées au sein du groupe de travail Communication et Systèmes d'Information, dans le cadre du Congrès de l'Organisation Nationale Indigène du Cauca (ONIC). 

L'objectif pour lequel se sont réunis les indigènes et non-indigènes, « communicateurs communautaires », journalistes, « communicateurs sociaux », autorités traditionnelles, femmes, anciens, jeunes et le reste de la communauté participant au Groupe 9 de Communications et Systèmes d'information, a été d'échanger sur les réussites et les difficultés du Conseil de Communication (ONIC); réfléchir sur la communication indigène ; échanger sur les contextes politiques liés à la communication des peuples indigènes, et proposer quelques idées de travail qui seront fondamentales pour les mandats que devra assumer le prochain Conseil de Communication, représentant les différentes régions.

Hilber Humegé, actuel Conseiller de Communication de l'ONIC a informé sur le travail de visibilisation et de dénonciation continue qu'ils réalisent à travers le site web, la radio, des supports papiers et des vidéos. Il a également présenté le processus de communication de l'ONIC, de l'Association de Cabildos Indigènes du Nord du Cauca (ACIN) et l'Organisation Indigène d'Antioquia (OIA), qui a porté ses fruits avec la seconde édition du Festival de Cinéma et Vidéo Indigène, et la Rencontre de Femmes Réalisatrices, deux occasions de partager les expériences de communication du continent. 


Les participants ont reconnu l'effort de visibilisation, de gestion et de dénonciation réalisé par l'ONIC, tout en suggérant plus d'accompagnement des processus de communication communautaire des peuples, afin d'arriver à articuler et à travailler en réseau, ce qui manque cruellement aujourd'hui face aux agressions perpétuées à l'encontre des peuples indigènes. « Nous avons besoin d'échanger nos expériences de manière constante, créer des espaces de formation ; construire une toile de travail commune ; donner de la viabilité à nos médias », ont exprimé quelques participants.

Par ailleurs, le travail au sein de ce groupe de Communications et Systèmes d'Information, s'est concentré sur l'analyse du sens que l'on donne à la communication et du rôle que jouent les médias communautaires dans les processus de résistance indigène. « Avant d'avoir des téléphones, des ordinateurs, des caméras, des micros, on communiquait déjà. Écouter le chant d'un oiseau qui nous annonce la mort ; sentir un signal dans le corps qui nous avertit du danger ; parler autour du feu et écouter nos anciens ; chanter et rêver notre histoire et notre mémoire. C'est COMMUNIQUER » . Il est alors apparu évident et nécessaire d'aborder avec plus de profondeur la communication « propre », car la majorité des processus de communication se sont concentrés sur l'utilisation de moyens de communication externes, laissant de côté les formes et les espaces spécifiques d'une communication culturelle, spirituelle.

« Nous devons reconnaître, comprendre et valoriser notre communication indigène, ce que nous sommes avec la Terre Mère, tout en s'appropriant et transformant les moyens de communication externes en outils de soutien aux résistances et aux Plans de Vie ». Communiquer n'est pas seulement parler au micro, utiliser une caméra ou écrire sur un ordinateur. Pour les indigènes, communiquer c'est harmoniser tout ce qui est dans son entourage afin de défendre la vie et le territoire.

« Dans le Cauca c'est le conflit armé, à la Guajira c'est l'exploration, à pleins d'endroits, de l'industrie minière...L'agression que nous sommes en train de vivre en tant que peuples indigènes obéit à un système économique transnational qui ne cherche qu'à accumuler des richesses et à convertir notre Terre Mère en marchandise. C'est pour cela que nous devons identifier ces stratégies d'extermination et comprendre qu'elles font partie d'un même modèle. C'est de cette manière que nous pourrons y résister. » En ce sens, la communication doit s'aborder en fonction des contextes que vivent les peuples, afin qu'ils en définissent eux-mêmes la fonction. Par conséquent, si nous communiquons juste pour utiliser les médias, nous répondons au modèle qui nous coopte, mais si nous communiquons à travers nos propres formes et moyens appropriés, afin de faire prendre conscience de cette agression et arriver à ce que les communautés soient informées et mobilisées, nous communiquons pour défendre la vie sous toutes ses formes. 

Sur la base de ces réflexions et conversations, se sont détachées des grandes lignes à prendre en compte dans le Plan Stratégique que doit construire et assumer collectivement le prochain Conseil de Communication de l'ONIC, à partir de l'importance que mérite la communication indigène et l'usage stratégique dont doivent faire l'objet les médias utilisés :
  • renforcer et soutenir tous les espaces de formation et de diplomation en communication existants dans les macro-régions.
  • Promouvoir le travail articulé entre tous les processus et expériences de communication indigène.
  • Récupérer les productions de communication afin de les distribuer dans toutes les organisations indigènes.
  • Réaliser des rencontres permanentes de communicateurs et communicatrices afin d'évaluer et projeter les propositions de communication qui s'acheminent dans les territoires.
  • Travailler les stratégies de durabilité de gestion des moyens de communication.

Finalement, il est proposé de créer un Observatoire de Communication pour faire un suivi des processus de la base, mais aussi afin de soutenir et d'accompagner le Conseil de Communication de l'ONIC. De la même manière, il a été proposé d'approfondir et de continuer à travailler la communication pour la défense de la vie à l'intérieur des communautés, afin de construire une Politique Publique de Communication Indigène, que réponde en premier lieu aux nécessités réelles liées au contexte actuel des peuples indigènes, et dans un second temps aux requêtes du gouvernement.

Tissu de communication – ACIN