10 octobre 2012
« Lire les signes du corps,
comprendre le chant des oiseaux et le bruit de la rivière, fait
partie de notre communication ancestrale, spirituelle, indigène »,
il s'agit d'une des nombreuses réflexions menées au sein du groupe
de travail Communication et Systèmes d'Information, dans le cadre du
Congrès de l'Organisation Nationale Indigène du Cauca (ONIC).
L'objectif pour lequel se sont réunis
les indigènes et non-indigènes, « communicateurs
communautaires », journalistes, « communicateurs
sociaux », autorités traditionnelles, femmes, anciens, jeunes
et le reste de la communauté participant au Groupe 9 de
Communications et Systèmes d'information, a été d'échanger sur
les réussites et les difficultés du Conseil de Communication
(ONIC); réfléchir sur la communication indigène ; échanger
sur les contextes politiques liés à la communication des peuples
indigènes, et proposer quelques idées de travail qui seront
fondamentales pour les mandats que devra assumer le prochain Conseil
de Communication, représentant les différentes régions.
Hilber Humegé, actuel Conseiller de
Communication de l'ONIC a informé sur le travail de visibilisation
et de dénonciation continue qu'ils réalisent à travers le site
web, la radio, des supports papiers et des vidéos. Il a également
présenté le processus de communication de l'ONIC, de l'Association
de Cabildos Indigènes du Nord du Cauca (ACIN) et l'Organisation
Indigène d'Antioquia (OIA), qui a porté ses fruits avec la seconde
édition du Festival de Cinéma et Vidéo Indigène, et la Rencontre
de Femmes Réalisatrices, deux occasions de partager les expériences
de communication du continent.
Les participants ont reconnu l'effort
de visibilisation, de gestion et de dénonciation réalisé par
l'ONIC, tout en suggérant plus d'accompagnement des processus de
communication communautaire des peuples, afin d'arriver à articuler
et à travailler en réseau, ce qui manque cruellement aujourd'hui
face aux agressions perpétuées à l'encontre des peuples indigènes.
« Nous avons besoin d'échanger nos expériences de manière
constante, créer des espaces de formation ; construire une
toile de travail commune ; donner de la viabilité à nos
médias », ont exprimé quelques participants.
Par ailleurs, le travail au sein de ce
groupe de Communications et Systèmes d'Information, s'est concentré
sur l'analyse du sens que l'on donne à la communication et du rôle
que jouent les médias communautaires dans les processus de
résistance indigène. « Avant d'avoir des téléphones, des
ordinateurs, des caméras, des micros, on communiquait déjà.
Écouter le chant d'un oiseau qui nous annonce la mort ; sentir
un signal dans le corps qui nous avertit du danger ; parler
autour du feu et écouter nos anciens ; chanter et rêver notre
histoire et notre mémoire. C'est COMMUNIQUER » . Il est alors
apparu évident et nécessaire d'aborder avec plus de profondeur la
communication « propre », car la majorité des processus
de communication se sont concentrés sur l'utilisation de moyens de
communication externes, laissant de côté les formes et les espaces
spécifiques d'une communication culturelle, spirituelle.
« Nous devons reconnaître,
comprendre et valoriser notre communication indigène, ce que nous
sommes avec la Terre Mère, tout en s'appropriant et transformant les
moyens de communication externes en outils de soutien aux résistances
et aux Plans de Vie ». Communiquer n'est pas seulement parler
au micro, utiliser une caméra ou écrire sur un ordinateur. Pour les
indigènes, communiquer c'est harmoniser tout ce qui est dans son
entourage afin de défendre la vie et le territoire.
« Dans le Cauca c'est le conflit
armé, à la Guajira c'est l'exploration, à pleins d'endroits, de
l'industrie minière...L'agression que nous sommes en train de vivre
en tant que peuples indigènes obéit à un système économique
transnational qui ne cherche qu'à accumuler des richesses et à
convertir notre Terre Mère en marchandise. C'est pour cela que nous
devons identifier ces stratégies d'extermination et comprendre
qu'elles font partie d'un même modèle. C'est de cette manière que
nous pourrons y résister. » En ce sens, la communication doit
s'aborder en fonction des contextes que vivent les peuples, afin
qu'ils en définissent eux-mêmes la fonction. Par conséquent, si
nous communiquons juste pour utiliser les médias, nous répondons au
modèle qui nous coopte, mais si nous communiquons à travers nos
propres formes et moyens appropriés, afin de faire prendre
conscience de cette agression et arriver à ce que les communautés
soient informées et mobilisées, nous communiquons pour défendre la
vie sous toutes ses formes.
Sur la base de ces réflexions et
conversations, se sont détachées des grandes lignes à prendre en
compte dans le Plan Stratégique que doit construire et assumer
collectivement le prochain Conseil de Communication de l'ONIC, à
partir de l'importance que mérite la communication indigène et
l'usage stratégique dont doivent faire l'objet les médias
utilisés :
- renforcer et soutenir tous les espaces de formation et de diplomation en communication existants dans les macro-régions.
- Promouvoir le travail articulé entre tous les processus et expériences de communication indigène.
- Récupérer les productions de communication afin de les distribuer dans toutes les organisations indigènes.
- Réaliser des rencontres permanentes de communicateurs et communicatrices afin d'évaluer et projeter les propositions de communication qui s'acheminent dans les territoires.
- Travailler les stratégies de durabilité de gestion des moyens de communication.
Finalement, il est proposé de créer
un Observatoire de Communication pour faire un suivi des processus de
la base, mais aussi afin de soutenir et d'accompagner le Conseil de
Communication de l'ONIC. De la même manière, il a été proposé
d'approfondir et de continuer à travailler la communication pour la
défense de la vie à l'intérieur des communautés, afin de
construire une Politique Publique de Communication Indigène, que
réponde en premier lieu aux nécessités réelles liées au contexte
actuel des peuples indigènes, et dans un second temps aux requêtes
du gouvernement.
Tissu de communication – ACIN
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